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Au sein du tout récent Parc national des Forêts, qui s’étend sur un vaste espace entre la Bourgogne-Franche-Comté et le Grand Est, une réserve intégrale de 3086 hectares a été créée le 11 décembre 2021. Objectif ? « La protection renforcée de la faune et de la flore », ainsi que le « vieillissement » et « la libre expression des processus évolutifs naturels d’une forêt, à vocation de restauration de la naturalité, de référence écologique, de découverte et de recherche scientifique ».

3000 hectares de nature en libre-évolution, merveilleux ! Oui, sauf que… nous sommes en France, championne du monde des dérogations, et que la chasse, pourtant parfaitement interdite selon l’article 4 du décret portant création de la Réserve, redevient par magie autorisée dans l’article 6 du même décret !

Alors c‘est vrai, le mot « chasse » est soigneusement évité, au profit du mot « régulation »… un glissement sémantique qui ne changera rien, hélas, au destin des cerfs élaphe, des chevreuils et des sangliers, trois espèces inquiétées par les mêmes fusils et les mêmes gens armés qui pratiquent la chasse en dehors de la Réserve, et qui ne bénéficieront donc pas, dans ce faux sanctuaire, de la « protection renforcée de la faune » promise…

Le Parc justifie cette chasse de régulation par l’absence de prédateurs naturels… Forcément, puisqu’on les avait exterminés jusqu’au dernier ! Mais plutôt que de favoriser le retour naturel des loups et des lynx (voire pourquoi pas des réintroductions volontaires ?), on préfère autoriser des bipèdes armés à pénétrer dans un espace qui se veut pourtant strictement protégé.

On peut aussi se demander quel est l’intérêt de persécuter ces cervidés et ongulés, sachant qu’il n’y a pas d’exploitation économique du bois dans une telle Réserve, et que la notion de « dégât » n’a juste aucun sens dans un biotope réservé à la seule libre naturalité… La réponse ne fait évidemment pas mystère : ce sont les lobbies de la chasse et de l’agriculture qui sont derrière !

Rappelons par ailleurs, comme nous le dénoncions en août 2021, qu’en dehors de la Réserve intégrale, la chasse est autorisée sur pas moins de 37 espèces (!) dans différentes zones du Parc National, dont certaines sont considérées en mauvais état de conservation par l’UICN, tels le vanneau huppé et la bécassine des marais… Cette aire théoriquement protégée autorise même des pratiques telles l’agrainage des sangliers, la chasse à courre… et la chasse en enclos (!!).

Protection forte…ment controversée

La création de la Réserve intégrale du Parc national des Forêts voit le jour au moment où l’État met en application sa volonté d’atteindre au moins 30% d’aires protégées en France d’ici 2030, dont 10% en « protection forte ». « Protection forte » ? Sa définition fait actuellement l’objet d’une consultation publique, ouverte jusqu’au 5 février sur le site du ministère de la Transition écologique… L’ASPAS vous encourage fortement à y répondre, car le texte proposé n’est clairement pas à la hauteur des défis titanesques auxquels est confronté l’Humanité du 21e siècle : la lutte pro-active contre le changement climatique et la disparition alarmante des espèces !

© Photo d’en-tête : Fabrice Cahez